Une célébration au goût amer

Ce dimanche 7 février 2021, à l’occasion des 50 ans du suffrage des Suissesses, nous n’avons pas grand-chose à célébrer. Étant donné que la lutte pour ce droit de vote a duré cent ans, les Zurichoises ayant déposé la première pétition pour un vote cantonal en 1868, nous ne pouvons ressentir ni gratitude ni joie pour cet anniversaire. Quelles insultes et frustrations, quelles subordinations à des intérêts opportunistes nos prédécesseuses ont dû subir durant toutes ces années, pour arracher cette concession ! Non seulement nous étions parmi les plus retardataires des pays occidentaux, mais nous avons encore dû attendre jusqu’à 1990 pour que ce droit soit obtenu jusqu’au dernier canton primitif réfractaire. Cinquante ans pour un droit aussi fondamental, c’est une honte !

Dès lors, on parle de « suffrage universel » ; mais celui-ci reste incomplet. On croit avoir acquis le « droit de vote des femmes* », mais de nombreuses femmes* ne peuvent toujours pas voter aujourd’hui. Le quart de la population reste en effet encore privé de droits politiques, faute de passeport suisse. C’est une démocratie fort incomplète dans laquelle nous vivons.

Par ailleurs, le droit de vote semble n’avoir qu’une importance symbolique lorsqu’on regarde entre les mains de qui le pouvoir réel – que ce soit économique, social, politique, culturel, ou institutionnel – se trouve encore et toujours aujourd’hui: de vieux hommes blancs cisgenres hétérosexuels et valides. Pas exactement l’image qu’on se fait d’une démocratie censée représenter la population dans sa totalité. La participation des femmes* et des minorités dans des institutions politiques conçues par et pour les hommes cis progresse, mais nous savons bien que les véritables enjeux sont ailleurs.

La lutte continue, car ce que nous voulons c’est une transformation profonde de la société et des institutions pour en faire des espaces où tout le monde peut participer et décider ensemble de notre avenir commun. Nous exigeons une démocratie réelle, pour tout le monde. Une démocratie où les personnes concernées sont consultées et écoutées lorsqu’on veut légiférer à leur sujet, contrairement à ce qu’on observe par exemple aujourd’hui sur la question de l’initiative dite « anti-burqa », à laquelle nous sommes fermement opposées.

En conclusion, ce que nous pouvons célébrer, 50 ans après l’obtention du suffrage des Suissesses, c’est la persévérance courageuse des féministes dans cette longue lutte qui ne s’est pas terminée depuis. Symboliquement, nous célébrons cette année aussi le jubilé du 30e anniversaire de la première grève des femmes* en Suisse. En cette année particulière, nous rendons hommage à ces guerrières et espérons être à la hauteur de leur héritage.

Si tu peux voter aujourd’hui, remercie une féministe ! 

NEUCHÂTEL

  • 6 février: Dépôt de revendications dans une urne symbolique que le collectif neuchâtelois pour la grève féministe promènera dans la zone piétonne à Neuchâtel, samedi 6 février entre 10h et 12h et entre 14h et 16h. Les revendications seront publiées et celles qui peuvent se réaliser sur le plan communal ou cantonal seront adressées aux élu.e.x.s et aux candidat.e.x.s aux élections cantonales 2021.
  • 7 février: Conférence-débat en ligne – 1971 suffrage féminin, 2021 suffrage universel ? – Intervenant.e.s : Claudine Stähli-Wolf, femme politique et militante ADF et Marc Perrenoud, historien féministe – Organisé par le groupe d’intérêt des femmes et le groupe d’intérêt migrant lien vers les infos de l’événement
  • 17 février: Conférence-débat en ligne – La longue lutte pour le suffrage féminin en Suisse – Avec Brigitte Studer historienne féministe qui signe un livre passionnant  « La Conquête d’un droit. Le suffrage féminin en Suisse » – de 18h30 à 20h – lien pour s’inscrire

VALAIS

JURA

Campagne d’affichage dans tout le canton